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Chef décorateur


Arlaud« On fabrique du vent, et s’il n’y avait pas de vent, on n’aurait jamais traversé les mers… »

YAN ARLAUD, Chef décorateur

Bercé par des dîners avec « Audiard, Granier Deferre, Delannoy, Ciampi… », auprès de son père scénariste Rodolphe-Maurice Arlaud, Yan Arlaud se considère comme un outsider dans la profession : à cause de sa formation de biologiste et de son parcours dans le métier. Il déteste le corporatisme, utilise un langage de tous les jours et fuit les mondanités.
Scientifique de formation, il rencontre Alain Pitrel*1 qui lui apprend le métier d’accessoiriste ; il cumulera ce poste avec celui de premier assistant déco jusqu’au film Le Brasier d’Eric Barbier en 1991 où il est promu chef décorateur par Jacques Bufnoir dont il était l’assistant. Sur les films de Pierre Salvadori, Bernard Giraudeau, Rithy Panh, Rachid Bouchareb, Arnaud des Pallières*2…, humble et passionné, Yan Arlaud défend l’idée que la création se fait avec liberté. Quelques soient les origines sociales ou le bagage, selon lui, les chances sont les mêmes, une seule arme est nécessaire : la passion. La réussite n’est pas forcément à la sortie des écoles de cinéma. Savoir se documenter, goûter à la diversité des territoires et des projets artistiques et surtout être à l’écoute du réalisateur, voici le moteur.
Surnommé « ethno-décorateur », il aime se sentir immigré quelque part. Arrivé en Languedoc-Roussillon en 1988 pour De sable et de sang, un film de Jeanne Labrune sur la tauromachie, Yan Arlaud est capable de faire stipuler sur son contrat qu’il n’assistera à aucune corrida par conviction mais qui finalement, suite à la rencontre avec Nimeño II*3, deviendra valet d’épée pendant un an. Son parcours est une suite de passions qu’il assume entièrement : la biologie qui lui permet de faire accoucher une femme dans un dispensaire en Afrique, pris au piège du faux qu’il fabrique ; la tauromachie ou comment se jouer de la mort et faire le choix d’une autre vie ; le cinéma ou apprendre à traduire en images les désirs d’un réalisateur.
Dans les métiers du cinéma, ce sont généralement les producteurs ou réalisateurs qui contactent les techniciens. Pourtant, après son premier film en Afrique, Blanc d’ébène de Cheik Doukouré en 1991, il décide de quitter Paris au risque que le téléphone sonne moins. Un peu plus au sud, il peut désormais se ressourcer entre deux projets. Le téléphone continue à sonner.
Des échanges avec le réalisateur aux négociations financières avec le directeur de production et au fil de ses rencontres avec les autres chefs de poste, il va préparer ses décors en commençant par élaborer, avec son premier assistant et l’ensemblier, un « livre décors”. Dans ce livre, on trouvera les images de tous les décors dans l’ordre des séquences, une sorte de continuité en images. Les discussions artistiques se feront autour de cet objet.
La réalisation des décors vient ensuite. La gestion humaine et financière est primordiale. Le plan de travail est rigoureux, chacun a sa place : constructeurs, peintres, serruriers, staffeurs, ensembliers, rippeurs*4, couturiers… tous avancent en étroite collaboration avec les autres équipes jusqu’à la livraison du décor, mais tout peut être remis en question jusqu’au matin du tournage.
Certaines situations de tournage ou demandes du réalisateur nécessitent des prouesses techniques et sont source d’angoisse, mais le plus difficile à gérer, tout en étant capitaine d’une équipe, reste la gestion de ses propres émotions. Une fois livré, le décor est confié à l’accessoiriste qui devra le faire vivre au mieux, en luttant parfois « contre ceux qui poseront une tasse de café bouillant sur un meuble vernis de plusieurs siècles ».
Son travail est d’aider un réalisateur à fabriquer des images, cela passe par des constructions éphémères.

*1 Chef décorateur, ensemblier
*2 “Michael Kohlhaas”, 2013. Film qui lui a valu d’être nommé aux César
*3 Célèbre matador français
*4 Personne qui participe au montage et au démontage des installations sur le plateau

5 dates qui ont marqué le parcours de Yan Arlaud :

Année de naissance : 1956
Formation ou rencontre la plus significative : 1985 – rencontre avec Alain Pitrel sur le film Police de Maurice Pialat
Arrivée en région : 1991 – installation à Collias
Premier film sur lequel tu as travaillé pour le cinéma : 1983 – stagiaire sur Un dimanche à la campagne de Bertrand Tavernier.
Date de ton choix par rapport à un événement intéressant qui te tient à cœur : 11 / 11 / 1991 – rencontre avec Hélène Imbert chef peintre dans un atelier de théâtre à Lyon sur un très mauvais film : La légende de Jérôme Diamand Berger (mais quel très beau souvenir). Depuis ce jour je vis avec cette “dame” !!!

Films qui ont marqué le parcours de Yan Arlaud :

Le brasier de Eric Barbier, 1989
Les caprices d’un fleuve de Bernard Giraudeau, 1995
Barrage contre le pacifique de Rithy Panh,  2007
Hors la loi de Rachid Bouchareb, 2009
Enemy way de Rachid Bouchareb, 2013

Son actualité :

Bébés volés d’Alain Berliner, tourné à Nîmes et alentours, 2015
Un juif pour l’exemple de Jacob Berger, 2014/2015
Kaboul Kitchen (saison 3), de Virginie Sauveur  et Guillaume Nicloux, 2016