VIRGINIE GUILMINOT
« Raconter de belles histoires en fabriquant de belles images. »
VIRGINIE GUILMINOT, Directrice de production de films d’animation
En 2017, dans un bâtiment « couveuse » d’entreprises de l’économie sociale et solidaire de la région Occitanie, Virginie Guilminot accueille en présentant chaque membre de l’équipe : une vingtaine de personnes devant autant d’ordinateurs. On enchaîne par un thé : « Il vient de chez Scop’ti, ancienne usine Eléphant reprise en scop par ses salariés en Provence ».
Les Fées Spéciales, société de fabrication de films d’animation, est également constituée sous forme coopérative et participative. Virginie Guilminot en est la gérante élue pour trois ans, après ça tourne. Se situer dans ce champ social et innovant, outre cette particularité des Scop où la voix de chacun.e compte à égalité, c’est faire le choix de logiciels libres et prendre en charge l’empreinte écologique de l’activité. Activité de lancement de l’entreprise avec la participation au dernier film de Michel Ocelot, Dilili à Paris et, pour les mois qui viennent, la réalisation des multimédias pour le Musée Fleury de Lodève.
Pour aboutir à cette cohérence, Virginie aura tout au long de son parcours procédé par choix. Et donc par élimination. Après un bac scientifique et des études de communication, elle apprend son métier en tant qu’infographiste 3D, essentiellement dans la publicité, avant de fuir un univers peu engageant. Une fuite dont on peut faire éloge, un doctorat à Paris VIII, où résonne un esprit libertaire qu’elle retrouve aujourd’hui dans ces logiciels libres qui « déverrouillent la dictature et les normes des éditeurs de logiciels ». Son sujet de mémoire : comment « privilégier la sensibilité à la prouesse technique » en se défaisant du piège du réalisme.
Ce sera son autre fuite : « les réunions poils ». « On les appelait ainsi parce qu’on passait des heures, pour le film L’Arche de Noé par exemple, à savoir comment on ferait les poils des animaux…. Ce qu’on a perdu entre temps, c’est le sens. Quand on travaille en fiction avec des producteurs de cinéma, on réfléchit au film, au scénario. En animation, trop souvent, on est comme des ouvriers à la chaîne sur des bagnoles. »
La collaboration avec Michel Ocelot va lui permettre d’envisager le travail autrement : « Dix-huit mois idylliques, on apprenait en faisant ». Directrice de production pour Azur et Asmar, elle retrouvera cette ambiance pour Les Contes de la nuit : « Douze mois, quinze personnes, un gros volume de travail, une petite équipe et on y arrive quand même ! ». C’est aussi une fréquentation assidue des festivals (Annecy, E.magiciens à Valenciennes) et l’impulsion d’autres (Les Temps du numérique au Vigan) qui lui fera garder le lien avec un monde de la création jeune, innovant. En 2010, elle fait le choix d’une installation à Montpellier, tout en sachant qu’elle va peut-être y sacrifier le métier. Dans le domaine, « tout est à Paris ».
Pour que les choses changent, il faut construire par soi-même. Virginie retrouve Eric Serre, directeur artistique rencontré pour Azur et Asmar et installé à Arles, puis Eve Machuel, productrice exécutive des Contes de la nuit et enfin Flavio Perez qui quittait le studio Illumination Mac Guff pour descendre en Espagne et que Virginie stoppera à Montpellier. Partant du constat de ce qu’est devenue l’industrie du film d’animation, « où l’argent a pris le pouvoir sur tout, où des chaînes industrielles profitent de « permittents » précaires », Les Fées Spéciales ont pris le contrepied : « Ne pas dépasser trente personnes, privilégier des circuits courts, produire nos propres projets, se tourner vers les autres rives de la Méditerranée, faire vivre la mixité et vivre de notre travail en région… Le tout dans la joie. » Enfant curieuse, joueuse, bricoleuse, celle qui voulait faire les Arts Déco ou être clown sera devenue fée. En travaillant et se formant constamment, sans jamais perdre de vue l’éthique de ce travail.
En 2019, elle quitte la SCOP mais reprend sa baguette de directrice de production en intermittence, sur de beaux projets dont Les Astres immobiles (C.M. Canal +) de Noémi Gruner et Séléna Picque, Cherchez la Femme ! (série Arte.tv) de Julie Gavras, et deux longs métrages produits par Sacrebleu Productions : Sirocco de Benoît Chieux (sorti déc 23) et Flow de Gints Zilbalodis (sortie prévue le 30 octobre 2024, il a déjà remporté 4 prix au Festival d’Annecy).
Au printemps 2023, Virginie embarque dans l’aventure SCALAÉ, Société Coopérative d’Intérêt Collectif, en tant qu’associée co-fondatrice. La SCIC produit la collection animée Première Page, refonte du programme intitulé En Sortant de l’école, co-produit avec France TV, imaginé et porté par Tant Mieux prod ! durant dix saisons. L’Objet de la coopérative, d’intérêt général, est d’accompagner ainsi qu’encourager l’émergence de nouveaux talents dans le secteur de l’animation.
5 dates qui ont marqué le parcours de Virginie Guilminot :
1996 : Doctorat en « Esthétique, Sciences et Technologies des Arts », Paris VIII.
2015 : Création des Fées Spéciales à Montpellier.
2022 : Directrice de production sur la série Cherchez la Femme! diffusé sur Arte
2023 : Devient associée co-fondatrice de la SCALAÉ (Société Coopérative d’Intérêt Collectif)
2024 : Directrice de production sur Flow réalisé par Gints Zilbalodis
5 films qui ont marqué le parcours de Virginie Guilminot :
Lux, Styx, Sine Die, DEUS, 1992-93-94. Auteure-réalisatrice.
Kaena la prophétie de C.Delaporte et P.Pinon, premier long métrage d’animation 3D français, Chaman-Xilam, 2003. Assistante de réalisation.
Azur et Asmar, de Michel Ocelot, Nord-Ouest Films, Mag Guff, Studio O., 2005. Directrice de production.
Sirocco et le Royaume des courants d’air, de Benoît Chieux, Sacrebleu Productions, 2023, Directrice de production.
Flow, de Gints Zilbalodis, 2024, Directrice de production.
Son actualité :
Directrice de production en intermittence
Associée-Fondatrice de la SCIC SCALAÉ, diffusion de la saison 1 de Première Page sur France TV, printemps 2024