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Première assistante décoratrice


 

AURÉLIE JOLIBERT, DÉCORATRICE SUR LE DÉCOR DU TOURNAGE DU FILM DE ANDRÉ TÉCHINÉ EN ARIÈGE.
Photo: Ulrich Lebeuf / Myop pour Occitanie films

« La motivation première, c’est la promesse d’une aventure. »

Aurélie JOLIBERT, Première assistante décoratrice

On l’attrape, il n’y a pas d’autres mots, entre deux parties du tournage du film Les Âmes sœurs d’André Téchiné en Ariège, à côté d’Ax-les-Thermes, dans le manoir Coustaux-d’Orgeix, une grande bâtisse en fond de vallée d’Orlu. Depuis ce printemps de 2021, c’est le décor dans lequel s’investit Aurélie Jolibert, première assistante du chef décorateur argentin Carlos Conti, qui avait travaillé également pour Ma saison préférée. « Comme André Téchiné tourne souvent en Occitanie, on connaît ici sa manière de faire, avec de très petites équipes. On m’avait prévenue qu’avec lui il y aurait des surprises, qu’il faudrait s’adapter à cette façon très légère de tourner. Cela me plaît beaucoup, cette réactivité fait partie intégrante de nos métiers. »

Ce choix de travailler en « déco », elle le fait à Port-la-Nouvelle, sur le tournage du film de Léa Fehner, Les Ogres, en 2014. « C’est vraiment un tournant. J’étais troisième assistante déco et j’ai tellement aimé travailler sur ce film que j’ai décidé de m’engager dans la profession. » Elle y était jusque là arrivée presque par hasard, en 2013, au détour d’un assistanat de mise en scène qui l’avait ennuyée. Mais sur ce même tournage, elle remarque que l’équipe « déco », elle, s’amuse bien. Elle s’embarque avec eux sur le tournage suivant comme stagiaire.

Aurélie Jolibert s’installe dans la région parce que le travail y est possible. « J’ai la chance de ne tourner qu’en Occitanie. Le comble étant cet été, quand j’ai travaillé pour Meurtres à Figeac : habitant dans le Lot, c’est la première fois que, le soir, je rentre à la maison ! » Cela lui aura peut-être évité une angine. « Quand je reviens chez moi après un tournage, la pression tombe d’un coup et je tombe systématiquement malade. » Elle aime cet investissement total. « L’équipe déco arrive plusieurs semaines avant le début. Au moment du tournage, la cadence s’accélère, on livre les premiers décors ; pendant que les premières séquences sont tournées, on travaille sur les suivants et on démonte les précédents…Organiser tout cela, c’est le boulot de premier assistant, il faut une préparation millimétrée, des capacités d’anticipation mais aussi un fort relationnel, avec l’équipe, avec les gens chez qui on tourne et qui peuvent être plutôt surpris de la manière dont on travaille dans leurs intérieurs. »

Elle aurait pu s’engager complètement dans la réalisation, elle le fera peut-être. Sortie de l’Ecole nationale supérieure d’audiovisuel de Toulouse en 2010, elle réalise deux fictions et un documentaire qui marquent les esprits et les jurys. Mais ce plaisir qu’elle a à travailler en déco, pour le moment, l’occupe toute entière.

Son pire ennemi semble être l’ennui. C’est parce qu’elle s’ennuyait en Faculté d’art du spectacle qu’elle a passé le concours de l’Ensav. C’est parce qu’adolescente il n’y avait rien d’autre à faire dans sa banlieue parisienne qu’elle se rendait au minimum trois fois par semaine au cinéma. « Je voyais tout, sans parti-pris, des frères Dardenne à Terrence Malick, en passant par Ken Loach. On avait la chance d’avoir un excellent cinéma art&essai à Achères. Je n’ai jamais vu autant de films. » Elle continue. Un peu moins au cinéma faute de temps, mais « la plateforme Tënk peut me faire veiller tard en soirée ! »

Ce qu’elle aime : « Les histoires et leur pouvoir émotionnel. Pleurer devant un film, quand l’émotion y est trop forte Je me souviens encore de la lecture du scénario des Ogres qui m’avait tellement donné l’envie de faire ce film !

 

5 dates qui ont marqué le parcours de Aurélie Jolibert :

1984 : Naissance en Auvergne.
2006 : Concours d’entrée à l’Ensav – Master 2 Image.
2010 : Première réalisation, Etoiles errantes, court-métrage qui obtient le prix d’écriture Claude-Nougaro pour le scénario et le prix Jeune talent du festival Séquence de Toulouse.
2013 : Premier documentaire, Le Chant du Cygne, tourné dans les Pyrénées. Film qu’elle accompagne ensuite pendant plus de deux ans en festivals, en France et à l’étranger.
2019 : Obtention de l’aide à l’écriture pour un prochain docu-fiction, en Argentine dans la Cordillère des Andes, l’histoire d’un fils à la recherche de son père disparu, travailleur dans les mines de cuivre. « C’était avant le covid, le projet a dû être reporté, j’espère bien pouvoir le reprendre prochainement. ».


Films qui ont marqué le parcours de
Aurélie Jolibert :

Quand tu reviendras. Fiction d’Aurélie Jolibert, 2010. Premier prix du scénario du festival international d’Aubagne en 2009, produit par le Groupe de Recherches et d’Essais Cinématographiques (GREC). « L’histoire d’un voyage et d’une séparation entre une femme et un enfant qui n’est pas le sien, qu’elle ramène à sa vraie mère qu’il n’a pas vue depuis si longtemps. »

Les Ogres.
Fiction de Léa Fehner, 2015, prod. Bus Films. Un travail dont Aurélie Jolibert et la chef décoratrice, Pascale Consigny, disent qu’il a été « passionnant » par les recherches faites en amont à la fois sur l’univers des troupes de théâtre itinérantes, les souvenirs d’enfance de la réalisatrice, mais aussi « en puisant dans l’art contemporain, les pièces de Peter Brook, le cinéma de Fellini… ».

Rose et le Soldat. Fiction de Jean-Claude Barny, 2014, prod. Lizland. « Un film d’époque tourné en Martinique, pendant le régime de Vichy, dirigé par l’amiral Robert. Mon premier travail, très enrichissant, a été de me rendre aux Archives de Fort de France, pour chercher des images d’archives de cette triste période. »

Ni dieux ni maîtres. Fiction d’Eric Cherrière, 2019, prod. Logical Pictures / Ran entertainment. « Une très belle expérience que ce tournage dans le Lot ! J’étais chef décoratrice pour ce western  « fauché » où l’on a pourtant dû reconstituer tout un univers moyenâgeux. »

Les Âmes sœurs. Fiction d’André Téchiné, 2021, Curiosa films. « Pour un retour dans les Pyrénées et ma rencontre avec Carlos Conti ! ».