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CORINNE CARTAILLAC


 « Construire différemment des œuvres, mais toujours au service d’une histoire. »

CORINNE CARTAILLAC, Responsable de projets transmédia

 

 

Quand on entre dans les locaux de Pages et Images, si le plancher ne craque pas, c’est tout comme. Cet appartement ancien du quartier de la Comédie à Montpellier, reconverti en maison de production de films, fleure bon l’effervescence et le temps passé. C’est ici que Corinne Cartaillac veille sur les innovations : elle y pilote les projets transmédia.
Cette notion de veille est importante : « Dans ce domaine, l’évolution est permanente. Quand j’ai commencé, on appelait cela le multimédia, on élaborait des CD-Rom. Le débit internet ne permettait pas alors tout ce que l’on peut développer aujourd’hui » sourit Corinne Cartaillac. Enfant, en Aveyron, elle aimait déjà les mots, les collages et les surréalistes. Elle se souvient d’un livre, La petite fabrique de littérature, qui lui a ouvert bien des voies sur les formes de narration. Centre d’intérêt qu’elle partage avec l’auteur François Bon avec qui elle a travaillé sur le webdoc Chant Acier et avec qui elle met en chantier un projet transmédia autour de l’écrivain Lovecraft.

Transmédia, qu’est-ce à dire ? « Le champ des possibles est large et c’est exactement ce qui me plaît : on fait bouger les frontières entre le documentaire, la fiction, l’installation, on diversifie les formats en fonction des évolutions technologiques, à la croisée des chemins entre les récits, les formes de narration et leurs mises en images. »
Elle explique en prenant l’exemple du projet en cours autour de l’écrivain Lovecraft. Il sera construit en triptyque : un film sur la vie de l’auteur en réalité virtuelle ; une série de fictions courtes, adaptations cinématographiques de ses nouvelles ; une expérience interactive, toujours en réalité virtuelle, conçue comme une immersion poétique et sensorielle dans un rêve de Lovecraft. « On part toujours d’un sujet, d’une histoire. On exploite le potentiel de chaque media pour opérer une complémentarité sur le traitement du sujet. Mais l’humain reste au cœur de l’expérience, et le spectateur est invité à voyager librement dans ces différents niveaux de perception. »

Cette hybridation des formes a permis à Corinne de lier son désir de cinéma à son goût pour les livres. « J’ai toujours été attirée par des films à l’écriture originale, je pense à Dogville, ou aux films de Gondry, de Lynch… Au théâtre, j’ai aimé les formes qui adoptent le visuel dans la mise en scène. On peut avoir une impression de déconstruction, alors qu’il s’agit juste de construire différemment. » Une pratique qu’elle a débuté dans les années 90 en suivant un cursus en cinéma et conception interactive à l’Université Paul-Valéry et en partant au Québec, alors précurseur dans ces nouvelles formes, pour y terminer son mémoire sur « l’interactivité au service du message ». Aujourd’hui, c’est à son tour d’enseigner à l’Université de Montpellier en « Licence professionnelle Concepteur audiovisuel et nouveaux médias ».

Réaliser ce type de projets demande à la fois créativité et rigueur. « Il faut savoir faire « exploser » des formes et, comme un architecte, dessiner le tracé d’un imaginaire en proposant plusieurs chemins d’accès ». Cela requiert également une disposition à l’organisation : outre l’accompagnement des auteurs dans leurs desseins, il faut orchestrer une diversité de postes, de tâches, articuler ces différentes disciplines, et diriger plusieurs œuvres à la fois, à différents stades de développement. « Les équipes sont beaucoup plus volumineuses. « Chant acier », par exemple, a réuni une vingtaine de personnes. » Si ces nouveaux médias offrent la possibilité de repenser les formes d’expressions au regard des différents moyens de diffusion, « cela participe aussi à la mutation numérique des industries culturelles et créatives françaises. » Une zone d’expérimentation pour le moins « fascinante » selon Corinne Cartaillac.

 
 

5 dates qui ont marqué le parcours de Corinne Cartaillac :

1964 : Naissance à Séverac-le-Château (12)
1990 : Etudes Cinéma et conception interactive – Université Paul-Valéry. (Bac+4)
1995 : Chargée de projets multimédia à Montréal (Québec)
2000 : Co-fondation de l’association Novamedia prod et chargée de cours à l’université
2014 : Responsable des projets transmédia pour Pages & Images.

5 films qui ont marqué le parcours de Corinne Cartaillac :

La vague interactive, compilation de nombreuses créations qui exploraient les possibilités de l’interactivité, très inspirantes – 1992-96 Milia d’or
Musée transversal – 2012 – coréalisatrice avec Didier Lannoy et productrice de 4 films courts, une approche de l’art par l’émotion : Folie phonique, Enfance de l’Art, Épique et Extase, diffusés et connectés à une installation avec webcam (Musée Fabre, MRAC Sérignan, Musée Archéologique de Narbonne, Musée d’Art Moderne de Céret)
Troubled Waters – 2014/15 – Conception interactive – Réalisé par Isabelle Sylvestre – Produit par Honkytonk Films Paris – Prix Multimédia de la Méditerranée – PRIMED 2016 –  http://troubled-waters.net/index-EN.html
Atome Hôtel – 2015 – premier webdocumentaire produit au sein de Pages & Images, concept proposé par Thierry Brassac, composé de 30 films courts sur les atomes réalisés par Baptiste Rouveure, diffusé par France Télévisions Éducation et RTS Découvertes – http://education.francetv.fr/atome-hotel/
Chant Acier – 2016 – Une plongée dans l’usine sidérurgique, une expérience documentaire et littéraire de François Bon, Emmanuel Roy et Annabel Roux accompagné d’Interview de grands témoins et d’un livre numérique, produit par Pages & Images, diffusé par France Télévisions nouvelles écritures – http://chant-acier.nouvelles-ecritures.francetv.fr/

Son actualité :

Lovecraft and Behind, triptyque transmédia, biopic VR, série de courtes fictions et expérience VR de François Bon et Sébastien Loghmann
Amateurs d’ordre, web série sur le vigilantisme de Felix Gonzalez, Benoît Mars, Younn Locart et Guilhem Brouillet, en coproduction avec Acronyme Films
Mementopolis, projet transmédia de Solène Vion, Christine Darrigade et Antoine Bourlier